Photographies : © Xavier Desmier / Texte : © Serge Guiraud

Les Kayapo sont localisés au sud du Para et au nord du Mato Grosso. Ils occupent un territoire fractionné dont la superficie totale est aussi vaste que l’Autriche. Avec un effectif de plus de 11 000 personnes, les Kayapo se classent parmi les vingt ethnies du Brésil les plus peuplées.

Durant un siècle, les Kayapo vont entretenir des relations belliqueuses avec les autres ethnies et avec la société non-indienne. Ils organisaient des raids guerriers pour capturer des femmes, des enfants et s’appropriaient des objets et des biens industrialisés. Humains et quincaillerie étaient ainsi incorporés à la société kayapo.  De nos jours, l’acquisition de ces biens, obtenus à l’extérieur par des échanges mercantiles, constitue encore un mode singulier de relation avec l’altérité. Au premier regard, l’adoption d’objets manufacturés laisserait penser à un processus irréversible de modifications du mode de vie des Kayapo. Or, cette acculturation a offert plusieurs avantages en intégrant les Indiens dans la vie politique, économique et culturelle du pays. Elle prouve qu’une culture n’est jamais figée. Elle est au contraire une construction constante faite d’adaptation, d’emprunts, d’influences, d’innovations, de pertes et de substitutions.

Bien que leur effectif soit en constante augmentation, les Amérindiens sont contraints de « se donner à voir » à l’extérieur pour revendiquer leurs droits à la terre et à la différence. Cela signifie qu’ils doivent correspondre à un imaginaire fabriqué, autrement dit à une « façon blanche d’être indien ». Les kayapo ont compris parfaitement que de rendre visible leurs traits culturels – peintures corporelles, rites et comportements belliqueux – était la meilleure arme de défense. Ils n’ont pas hésité à introduire la technologie moderne comme la vidéo pour accentuer une visibilité autant sur le plan national qu’international. Ils mettent en scène un rite, dramatisent un mythe, accentuent la beauté des corps sans toutefois dévoiler le sacré. Ils restent maîtres de ce qu’ils veulent montrer et ce qu’ils veulent garder secret. La vidéo est aussi un instrument de « mise en patrimoine » d’éléments culturels matériels et immatériels qui, sans remplacer l’oralité, est une nouvelle forme de transmission entre les générations.